Luc Boltanski « Une étude en noir », Tracés 1/2011 (n° 20), p. 49-73.
URL :
www.cairn.info/revue-traces-2011-1-page-49.htm.
Pourquoi le récit policier qui, comme son nom l’indique, relate ce dont s’occupe la police, s’est-il mis en place, au moins à l’origine, sur la base de la distinction, voire de l’opposition, entre d’un côté le personnage du détective et de l’autre celui du policier ? Dans cet article, qui prend surtout appui sur les histoires de Sherlock Holmes, publiées par Arthur Conan Doyle entre 1887 et 1927, on partira de cette question pour analyser la relation entre l’émergence du roman policier et la montée en puissance de l’État-nation. Ce dernier, dans son projet biopolitique, se veut le garant d’une réalité ordonnée et prévisible. C’est sur ce fond de réalité, en principe calculable, que se détache l’énigme. Mais la réalité sociale est habitée par une tension entre légalité et société de classes. Le policier incarne l’ordre légal auquel sont astreints les subordonnés. Le détective, en utilisant des moyens qui excèdent la légalité, résout les énigmes auxquelles sont confrontés les membres de la haute société. Le détective, c’est l’État en état d’exception ordinaire.
Mots clés
roman policier, État, exception, réalité, énigme
Pour Julien Coupat et « Les neuf de Tarnac »